L’Office National d’Etudes et de Recherches Aéronautiques a présenté lors du Salon du Bourget une maquette de sa vision de l’avion du futur. Nous avons pu nous entretenir avec Olivier Atinault, Ingénieur de recherche à l’ONERA sur ce projet.
Le projet NOVA (pour Next Onera Versatile Aircraft) a pour but d’étudier un avion avec des caractéristiques proches d’un A321 ou d’un B737-900, c’est à dire un avion capable d’embarquer environ 180 passagers, sur 3 000 nautiques (5 500km) à une vitesse d’environ Mach 0,8.
Pour réaliser cela, les ingénieurs sont partis du constat que depuis les années 60, les grandes lignes des avions de transport de passagers n’avaient que peu évolué. En effet, on retrouve sur tous les avions de lignes de plus de 100 passagers une section ronde, une voilure en flèche et des réacteurs placés sous les ailes de l’appareil.
L’ONERA a donc étudié différentes configurations d’aéronefs, en tenant à la fois compte du dessin de l’avion mais aussi de la position et du type des moteurs. La tendance actuelle est en effet à l’augmentation du diamètre des moteurs et l’installation sous voilure pourrait être condamné dans un avenir compris entre 10 et 20 ans. Il est ressorti de cette étude quatre configurations.
La première reprends l’installation classique des moteurs sous l’aile. L’aile garde une forme conventionnelle avec un dièdre constant, c’est à dire l’angle entre le plan horizontal et l’aile. Ici seul le fuselage est profondément modifié. En effet, celui-ci présente une section ovoïde, ce qui permet d’adopter une cellule plus large et plus courte. Cette cellule présente donc l’avantage de permettre de réaliser un bi-couloir alignant sept passagers de front en configuration 2-3-2. On gagne ainsi un passager par rangée vis à vis des configurations habituelles, et la présence d’un couloir supplémentaire permet d’effectuer des embarquements et débarquements plus rapide. Ce gain de temps sera apprécié par les compagnies aériennes réalisant des vols avec de nombreuses rotations quotidiennes.
Le design de cette cellule participe aussi à la portance de l’avion, notamment grâce à la modification de la pointe avant. Un des défis à relever sur une section ovoïde consiste à supporter les efforts liés à la pressurisation-dépressurisation permanente de l’avion, beaucoup plus complexe qu’avec une section ronde. Pour cela, il fallait renforcer la cellule afin de lui permettre de résister aux contraintes. Jusqu’à présent, cela semblait inenvisageable avec des matériaux conventionnels mais la pénalité de masse avec des matériaux composites s’avérait elle tout à fait acceptable. D’autant plus que la largeur accrue de l’appareil et les sept sièges de front permet, pour un nombre de passager équivalent, d’avoir un appareil plus court, ce qui permet de gagner de la masse et de compenser l’embonpoint causé par les renforts structurels.
Le bout des ailes a aussi été revu avec une forme de winglet inhabituel. Celle ci est proposé par l’ONERA avec un angle vers le bas. Le but des winglets reste le même, à savoir réduire la trainée de l’appareil (et donc la consommation). Une thèse de l’ONERA a ici prouvé que cette forme de winglet offrait une pénalité aérodynamique très faible (par rapport aux winglets orientées vers le haut). Une winglet entraîne une « courbure » de l’aile vers le haut et nécessite donc un renforcement de celle ci. Or le renforcement nécessaire est bien moins important avec une winglet vers le bas.
La seconde configuration offre, comme la précédente, un empennage en V. Cet empennage est donc plus léger et présente moins de traînée aérodynamique qu’un empennage en T.
Conservant une cellule de même type que précédemment, l’aile est modifiée pour présenter un angle de dièdre non constant sur la longueur de l’aile, dite alors “en forme de mouette”. L’intérêt de cette variation d’angle est de rehausser la position des réacteurs, ce qui permet alors de réduire la hauteurs des trains d’atterrissages et donc de gagner de la masse. Les trains d’atterrissages, des pièces particulièrement renforcées, sont en effets très lourds. L’angle non constant de la voilure permet aussi de monter un moteur de diamètre plus important sous la voilure.
Ce design “Gull-wing” nécessite un renforcement de l’aile et donc une pénalité en masse…qui a été calculé par les ingénieurs de l’ONERA et reste moins importante que le gain engendré par le raccourcissement des trains d’atterrissages.
Sur les troisièmes et quatrièmes configurations on retrouve un empennage en T tandis que l’aile possède un angle de dièdre constant et la cellule la même forme ovoïde.
Ici les moteurs sont placés à l’arrière du fuselage. Et l’innovation majeure est la. En effet, si la troisième configuration présente des moteurs fixés sur des mâts comme cela se fait depuis la célèbre Caravelle des années 1950, l’ONERA propose sur sa dernière configuration des moteurs semi-encastrés dans le fuselage. Cela leur permettra d’ingérer la couche limite, potentiellement très turbulente. Cette couche limite, est un écoulement d’air lent qui se forme le long de la cellule de l’avion. D’une épaisseur d’environ 1cm au début de l’avion, elle en fait environ 40 au niveau de la queue de l’avion.
Les moteurs actuels ne sont pas conçus pour ingérer cette couche limite car ils doivent récupérer un flux d’air constant, hors la couche limite est stratifié avec une vitesse de plus en plus importante en allant vers l’extérieur de l’avion. Mais les moteurs proposés par l’ONERA dit à très fort taux de dilution permettront d’absorber cet écoulement d’air stratifié. Cela est possible grâce à des moteurs plus gros et qui tournent plus lentement. L’absorption de couche limite présente un avantage réel, car il est plus simple d’accélérer de l’air lent que de l’air rapide. Cette facilité entraînera donc des économies importantes de carburant. De plus, en absorbant la couche limite, on peut supprimer certains des effets aérodynamiques néfastes de cette dernière, notamment sur la trainée de l’avion. Cette configuration a nécessité d’agrandir les entrées d’air pour permettre un débit d’air suffisant, cependant comme la nacelle est enterré et que le moteur n’est plus porté par un mat les surfaces de frottement ont été réduites.
Toutes ces améliorations sont autant de possibilités offertes aux industriels -constructeurs aéronautiques, motoristes etc.. – pour diminuer la consommation des aéronefs à l’objectif 2030.
Comme nous l’avons vu, de nombreuses pistes s’offrent et une amélioration doit toujours être vu de façon globale en calculant l’ensemble des paramètres qui pourraient être impactés.
Résumé en vidéo :
One Comment
Georges
Pour les versions trois et quatre, ça me fait penser à une Caravelle du 21 éme siècle.
Il me semble avoir déceler une petite coquille, je pense que c’est une cellule plus largue et plus courte plutôt que plus longue et plus courte :
En effet, celui-ci présente une section ovoïde, ce qui permet d’adopter une cellule plus longue et plus courte.